C’est aujourd’hui 13 août que l’humanité a consommé toutes les ressources que la planète met normalement à notre disposition pour une année. Dès aujourd’hui, l’humanité vit donc à crédit et la dette environnementale ne cesse de croître, année après année. La Suisse ne fait pas figure de bon élève : selon l’OFS, son empreinte écologique est aujourd’hui plus de quatre fois supérieure à sa biocapacité. Ce qui fait dire à cet office que « nous vivons au dépens d’autres régions du globe et des générations futures »[1], constat clair et sans ambiguïté qui devrait faire réagir tout politicien un tant soit peu soucieux du bien commun.

Comme le pape François l’a exprimé dans sa récente encyclique sur l’écologie « Loué sois-tu », je considère qu’il n’y a pas d’un côté une crise écologique et de l’autre une crise sociale, mais qu’il s’agit bien d’une seule et même crise socio-environnementale : la pauvreté comme la surexploitation des ressources sont liées à un système mondial basé sur le profit à court terme et une distribution inégale des richesses. C’est ce système qui pousse des milliers de miséreux à s’embarquer sur des radeaux de fortune pour atteindre l’eldorado européen et ce n’est pas dans la fermeture de nos frontières que se trouve la solution mais bien dans l’établissement d’un ordre économique mondial plus juste qui permettra aux habitants des pays pauvres de véritablement profiter de leurs richesses minières ou agricoles plutôt que de croupir dans la misère.

C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre ma motivation à m’engager dans une campagne au Conseil des Etats. J’entends profiter de la tribune offerte par une candidature pour attirer l’attention sur la dette écologique, réalité objective, qui malheureusement préoccupe bien moins les partis bourgeois que la dette publique, et sur la nécessité de réformer le fonctionnement du système économique pour à la fois mieux répartir les profits tirés de l’activité économique et gérer de manière soutenable les ressources naturelles. Il s’agit d’ailleurs là de l’objectif poursuivi par l’initiative pour une économie verte lancée par les Verts suisses.

Le Valais est particulièrement concerné par cette problématique. Pour ne donner que deux exemples : la pérennité de certaines activités économiques comme le tourisme ou celle de l’hydro-électricité est remis en cause par le changement climatique alors que la multiplication des événements extrêmes suite à l’élévation de la température remet en cause le maintien des populations dans les vallées latérales, les ouvrages de protection devenant de plus en plus difficiles à financer.

La réalité des choses fait qu’aujourd’hui, il faut revenir non pas à la bougie – reproche souvent entendu dans les milieux anti-écolo – mais à une société sobre car l’innovation technologique comme le renforcement des prescriptions environnementales ne suffiront pas pour répondre à la limitation des ressources naturelles.

C’est pourquoi, et c’est le message principal que j’entends faire passer dans ma campagne, un changement de valeurs par rapport à la société de consommation s’impose. Je suis toujours surpris de constater que nos enfants sont de plus en plus sensibilisés aux questions environnementales, par l’intermédiaire notamment de l’école, mais que dans le même temps ils sont bombardés de messages publicitaires leur faisant passer un message simple : « si tu veux être heureux, consomme ! ». Pour sortir de cette position pour le coup proprement schizophrénique, un changement de valeurs est nécessaire. Il faut privilégier l’être au lieu de l’avoir, l’usage plus que la possession (économie de la fonctionnalité), le renoncement volontaire plutôt que la fuite en avant, la lenteur plus que la rapidité, la satisfaction au lieu de l’accumulation.

Ce changement de valeur est déjà mis en œuvre aujourd’hui en Valais et en Suisse par celles et ceux qui s’engagent dans différents projets communautaires comme les systèmes d’échange localisé, les Repair Cafés, les jardins partagés, l’agriculture contractuelle, etc. Ces initiatives concrètes au niveau local permettent de mettre en œuvre l’adage « penser global, agir local ». Elles constituent le terreau sur lequel bâtir la société de demain et leur développement est crucial si l’on veut voir émerger la transition vers un monde évoluant dans les limites de son écosystème. Or, pour que ces initiatives puissent prendre de l’ampleur, des impulsions règlementaires sont nécessaires : les politiques publiques doivent favoriser ce type de mouvements où les gens reprennent leur destin en main.

Mon engagement dans cette campagne vise à sensibiliser et convaincre les Valaisannes et les Valaisans de la nécessiter de changer nos valeurs et nos modes de vie afin de permettre à nos compatriotes défavorisés, aux habitants du reste du monde comme à nos propres enfants d’avoir eux aussi une qualité de vie acceptable.

[1] http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/21/03/01.htm