Quelle vision politique pour Rhône 3 ?
Dans un arrêt publié le 14 avril 2021, le Tribunal fédéral conclut que la Loi valaisanne sur le financement de la troisième correction du Rhône votée en novembre 2018 viole le principe de l’égalité de traitement. Il donne ainsi raison aux CFF et au BLS qui contestaient leur participation au financement du projet Rhône 3.
Postulat urgent des Vert·e·s
La décision du TF a des conséquences immédiates sur le projet. Les modalités de financement de Rhône 3 doivent être revues, avec une participation cantonale en nette augmentation. De plus cette décision intervient à un moment décisif pour la suite du projet : remise en question du Service de la protection contre les crues du Rhône par le Grand Conseil et changement de chef de département.
Les CFF et le BLS viennent d’obtenir gain de cause auprès du Tribunal fédéral contre la Loi valaisanne sur le financement de la troisième correction du Rhône. Dans un arrêt publié le 14 avril 2021, le TF conclut que la loi votée en novembre 2018 viole le principe de l’égalité de traitement et que la participation des deux compagnies ferroviaires au financement des travaux n’est pas conforme au droit.
Le canton est donc sommé de revoir la Loi sur le financement de la troisième correction du Rhône. Cet arrêt du TF intervient dans un moment de crise traversé par le projet, qui dépasse largement l’aspect du financement.
Cette remise en question du mode de financement est l’occasion de mener une réflexion de fond sur le projet Rhône 3.
Malgré l’adoption du PA-R3 en 2016, l’entrée en vigueur de la Loi sur le financement de la troisième correction du Rhône en 2018 et l’organisation en 2019 d’un concours international pour l’aménagement des espaces publics longeant le fleuve, de Gletsch au Léman, le projet Rhône 3 peine à entrer dans la phase de réalisation. Seule la mesure prioritaire de Viège, débutée en 2010, a été réalisée à ce jour (fin des travaux 2024, coût total 160 mios), 20 ans après la décision du Grand Conseil portant sur le lancement du projet.
Les raisons qui expliquent cette lenteur sont liées à l’envergure et à la complexité du projet, qui s’étend sur 160 km de long et cumule des problématiques territoriales aussi différentes que la sécurité, l’environnement, l’économie, le paysage, le patrimoine, l’énergie ou la mobilité.Autre défaut majeur, l’absence de vision politique au niveau du Conseil d’Etat se répercute sur les services
cantonaux concernés (agriculture, mobilité, environnement, dangers naturels), qui s’affrontent au nom de bases légales contradictoires.
Le projet s’enlise, faute de priorités clairement énoncées et d’arbitrage entre les objectifs divergents. Comment imaginer la réalisation du chantier du siècle en Valais avec de tels désaccords dans les rangs de l’Etat?
Ces tensions se retrouvent au niveau de la gouvernance du projet, qui suscite de nombreuses interrogations au sein du parlement, depuis la création de l’Office cantonal de la construction du Rhône en 2017, puis du Service de la protection contre les crues du Rhône en 2020.
Conclusion
En parallèle de la révision du financement du projet, nous demandons au Conseil d’Etat de définir sa stratégie pour le Rhône.
Cette stratégie doit répondre aux objectifs suivants :
- intégrer tous les aspects du projet (territoire et paysage, environnement, économie, société, culture et patrimoine, énergie, mobilité, etc.), en plus des enjeux sécuritaires ;
- préciser les objectifs et fixer les priorités ;
- réaliser la pesée d’intérêt entre les bases légales divergentes et arbitrer les conflits ;
- réorganiser la gouvernance du projet et définir les missions des différents services cantonaux concernés.
Cette stratégie pourrait être précédée d’une expertise externe, à même d’apporter un regard objectif et neutre sur
les sources de blocage du projet et sur les solutions à envisager.
Réponse du Conseil d’Etat :
Le postulat met en évidence différents éléments d’actualité pour demander au Conseil d’Etat
de définir sa stratégie pour le Rhône.
Aujourd’hui, le Conseil d’Etat analyse les conséquences du Tribunal fédéral concernant l’appel à contribution des CFF et du BLS, mais cela ne remet pas en cause le financement de R3, assuré à 2/3 par la Confédération avec un crédit d’engagement d’un milliard de francs.
Les postulants mettent en évidence un manque de vision politique qui se répercute sur les services cantonaux concernés (agriculture, mobilité, environnement, dangers naturels, etc.) qui s’affrontent au nom de bases légales contradictoires. Et ils ajoutent que le projet s’enlise faute de priorités entre ces domaines et d’arbitrage entre les objectifs divergents. La coordination de ces politiques sectorielles est un enjeu majeur pour la réussite de R3 et donc pour la protection de la plaine du Rhône et de ses habitants. A Viège, ce pari est réussi.
Actuellement le Service de la protection contre les crues du Rhône (SPCR) finalise un tronçon répondant à toutes les demandes de manière coordonnée, soit la sécurité, l’économie, la nature, le paysage, l’agriculture, ainsi que les loisirs et la détente.
Ce besoin de vision transversale, entre le Conseil d’Etat, le Grand Conseil et les Services de l’administration cantonale est d’ailleurs la principale demande des porteurs de ce dossier.
Sur la base de ce qui a été réalisé jusqu’à présent, le Département de la mobilité, du territoire et de l’environnement (DMTE) va lancer une analyse et une réflexion de fond sur le projet, son financement, son fonctionnement et proposera les mesures utiles.
Il est proposé l’acceptation du postulat urgent.